Je refuse frénétiquement toute utilisation de l'écriture inclusive sur nos sites et dans nos publications. Et pareil pour la féminisation des titres et métiers. Ça me révulse ! Je dois être une féministe "canal historique" : je me suis battue pour la pilule, l'accès à l'enseignement, le port du pantalon... Mais ce n'est pas à coup de .e. qu'on changera les comportements. L'éducation, l'instruction, l'exemple doivent imprimer dans les mentalités respect, tolérance, équité, sens de la justice. Naturellement, mais avec fermeté, sans rien laisser passer.
La citation du jour :
Le mot «homme» est un terme générique qui embrasse les femmes.
(Gérard de Rohan-Chabot)
Lire l'article de Challenges : https://www.challenges.fr/politique/ecr … rse_507614
C’est avec l’usage que la langue s’adapte. Le jour où les postes de préfets, chercheurs, ingénieurs et autres métiers seront occupés par autant de femmes que d’hommes, le langage suivra.
"Grâce aux agriculteur.rice.s, aux artisan.e.s et aux commerçant.e.s, la Gaule était un pays riche". L’on pourrait croire à une nouvelle expérience d’écriture créative de l’OuLiPo où le "e", disparu sous la plume de Georges Pérec, ferait cette fois une grande apparition. Mais il s’agit plus prosaïquement d’un extrait en écriture inclusive du nouveau manuel scolaire édité par Hatier que les enseignants pourront désormais choisir pour leurs classes de CE2. Un manuel se voulant, comme l’explique son éditeur, "le reflet de la société et de ses évolutions". Mais le langage a-t-il besoin d’un manuel pour évoluer?
Le langage ne se décrète pas
Il est évident que l’égalité entre les femmes et les hommes doit être une priorité. Il est tout aussi évident que la langue française ne doit pas être figée pour être préservée et qu’une langue dite vivante doit justement s’adapter. Mais ce n’est pas en glissant de force des "e" minuscules entre deux points que l’on fera évoluer les usages. Le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes en apporte, sans le vouloir, la démonstration : c’est en constatant l’inapplication de la première circulaire relative à la féminisation des noms de métier que le Premier ministre a réitéré cette obligation en 1998. Vingt ans plus tard, entend-on davantage de femmes se dire "sapeuse-pompières" ou "doctoresses"?
Laissons les mots se transformer à leur rythme. C’est avec l’usage que la langue s’adapte et se transforme. "Ma doctrine est que ce sont les usagers qui décident", confiait récemment le linguiste Alain Rey dans un entretien pour Le 1. Prenons le mot "sénatrice". Dans sa version féminine, ce mot ne figure pas dans le Larousse. Il est pour autant facile de constater que cela ne l’a pas empêché de s’imposer dans le langage courant. Que l’usage précède le langage! Rien n’empêche les auteurs, "autrices" et les plumes en tous genres favorables à l’écriture inclusive de s’en saisir. Tout plaide en faveur d’une féminisation de certaines professions. Le jour où les professions de préfets, chercheurs, ingénieurs et autres activités seront occupées par autant de femmes que d’hommes, le langage suivra.
L’écriture inclusive pour les robots?
Selon étude menée par l’Université de Princeton sur un algorithme utilisé dans toutes sortes d’applications, l’intelligence artificielle associerait majoritairement les mots évoquant la gente féminine (fille, soeur, mère, etc.) aux notions de famille, enfants, foyer et aux arts. A l’inverse, l’algorithme rapprocherait automatiquement les hommes des notions de travail, carrière et les associe aux matières scientifiques et technologiques.
L’algorithme - né d’un concepteur subjectif - serait-il sexiste? Ou n’est-il que le reflet numérique de nos comportements individuels? Dans les deux cas, le big data alimente le risque de voir les comportements majoritaires devenir une norme. Et nous courrons aussi collectivement le risque de nous emprisonner dans nos propres conformismes. Faudra-t-il alors enseigner l’écriture inclusive aux robots? Commençons d’abord par intéresser les petites filles aux robots.